poirion08-SEMINAIRE
Méthodes constructives en aéroélasticité avec incertitudes
Fabrice POIRION
Département Aéroélasticité et Dynamique des Structures (DADS), branche Matériaux et Structures (MS), ONERA, Châtillon
Si, à première vue, le domaine de l’aéroélasticité semble éloigné du champ d’application des probabilités, en réalité il n’en est rien car l’étude du système couplé avion-aérodynamique est confrontée à des sources d’incertitudes et aléatoires. L’aléa provient essentiellement ici de l’excitation de la structure par la turbulence atmosphérique, (on ne se penchera pas ici sur l’excitation de la turbulence de couche limite, domaine réservé de l’Aérodynamique), les incertitudes provenant d’une connaissance ou modélisation incomplète de la structure ou des systèmes de vol. Une approche répandue dans le domaine des structures pour étudier les effets d'incertitudes est l'approche probabiliste: chaque paramètre incertain sera modélisé à l'aide de variables aléatoires. On doit alors étudier la stabilité d'un système dynamique à paramètres aléatoires. Une approche basée sur des méthodes de simulation de Monte Carlo a été développée à l'ONERA depuis plusieurs années, le but recherché étant de pouvoir disposer d'une technique constructive et aisément utilisable par les industriels, directement au sein de leurs codes de calculs classiques. Deux approches sont apparues les mieux adaptées. La première est une approche directe consistant à effectuer des tirages aléatoires des paramètres incertains dans le modèle éléments finis, puis à enchaîner sur un calcul classique de flottement à partir de la base modale du système perturbé. Cette approche est exacte dans le sens quelle ne repose pas sur des approximations linéaires ou autres. Seule la qualité des différents estimateurs va dépendre du nombre de simulations effectuées. La seconde approche repose sur l'hypothèse que les mouvements de l'ensemble des systèmes perturbés peuvent être représentées sur une base réduite unique. Les simulations concernent alors un système de petite dimension ce qui rend cette approche particulièrement attrayante. Cependant elle repose sur une représentation fidèle des matrices de structure aléatoires projetées, matrices de masse et de raideur généralisées. Une première étape a été de remplacer ces matrices par leur développement de Taylor à l'ordre 1 dans l'équation de flottement. Les tests numériques réalisés par AIRBUS ont montré que cette approximation n'est valable que pour de faibles incertitudes, inférieures à 20 %.
Nous avons alors étudié la possibilité d'utiliser à la place leur développement (tronqué) sur la base des chaos polynomiaux. Cette approche a donné de très bons résultats sur des cas tests de faible dimension. Cependant, en ce qui concerne son utilisation dans un cadre industriel, même si les résultats obtenus sont meilleurs que ceux obtenus par la première approche pour des incertitudes importantes, elle nécessite des calculs numériques coûteux pour construire les développements des matrices aléatoires, calculs basés sur une méthode de Monte Carlo, la rendant comparable au niveau du temps de calcul à la méthode de simulation directe. Il n'est pas donc certain qu'en l'état actuel des développements cette approche puisse être recommandée, mieux vaut en effet utiliser la méthode directe. Notons enfin que nous savons également prendre en compte des incertitudes sur la géométrie des surfaces portantes, tout au moins dans un cas bi-dimensionnel.
En ce qui concerne l’effet de la turbulence atmosphérique, les travaux ces dernières années ont porté sur la prise en compte de la turbulence longitudinale, qui apparaît dans le système dynamique couplé comme une excitation paramétrique multiplicative, modélisée par un processus stochastique stationnaire. De nouvelles méthodes mathématiques, basées sur le calcul de l’exposant de Lyapounov doivent alors être utilisées pour étudier la stabilité d’un tel système. Une telle approche avait été utilisée pour l’étude de l’effet des retards dans les lois de commandes d’un avion. Ici, la turbulence peut être modélisée par un processus gaussien mais aussi, ce qui n'est pas courant, par un processus non gaussien. On utilise pour cela une méthode de génération de trajectoires non gaussiennes développée à l'ONERA.